La chanteuse Zahra dément le passage rapporté dans le livre de Said Sadi sur Si Ahmed Abderrahmane et Ferhat Imazighen Imoula
Dans une mise au point rendue publique ce lundi 7 juin, la célèbre chanteuse Kabyle Zahra n Sumer a tenu à démentir formellement les écrits rapportés dans le deuxième tome des mémoires de Said Sadi, selon lesquels Si Ahmed Abderrahmane et Ferhat Imazighen Imoula auraient escroqué Idir il y a presque un demi-siècle de cela.
En effet, dans cet éclaircissement, la chanteuse voulait se présenter comme témoin d’une époque lointaine de presque 50 ans, puisqu’elle le souligne dès le début, tout en précisant qu’elle se doit de défendre la mémoire de Si Ahmed Abderrahmane, décédé récemment, et de rétablir la vérité des faits tels qu’ils se sont produits.
Elle poursuit son démenti en racontant d’abord les péripéties qu’ils ont dû endurer elle et ses amis lors d’une tournée en France où le fameux incident sujet à polémique a eu lieu. Toujours dans son témoignage par rapport à cette tournée en France, la chanteuse s’est demandée si Said Sadi n’a pas été mal informé avant d’évoquer ce sujet dans ses écrits.
Au moment ou Ferhat Imazighen Imoula, rappelons-le, ne s’est pas encore prononcé sur cette question, la chanteuse Zahra voulait apporter un éclaircissement important pour l’opinion publique kabyle.
Retrouvez ici le contenu de cette mise au point:
Assagi lliɣ, azekka wisen…
Je suis peut-être l’un des derniers témoins encore vivants pouvant témoigner de certains faits qui se sont déroulés loin dans le temps ! Je me dois de réhabiliter la mémoire du Docteur Si Ahmed Abderrahmane, injustement accusé lui et Ferhat Imazighen Imoula,d’avoir escroqué Idir,et d’avoir participé à un spectacle “Officiel”…J’imagine la peine qu’a dû ressentir Si Ahmed en lisant un passage du livre de Saîd Saadi ! D’autant plus qu’il ne pouvait absolument pas se défendre, étant dans l’anonymat le plus total depuis qu’il a arrêté la musique en 1976 ! Je prends l’entière responsabilité de mes propos ! Je te dois bien ça cher Abder !Si Ahmed Abderrahmane a fondé mon groupe “Le Quatuor Numide” en 1973. Excellent manager, il me composait mes chansons pour la scène. Nous tournions et animions beaucoup de spectacles, avec la Sonatour. Nous avions fait trois récitals à l’opéra d’Alger, du temps où Monsieur Tahar Laamiri, en était le directeur et acteur de formation ! Idir en ce temps-là faisait son service militaire à Blida, et nous avions toute la promotion du tube Avava Inouva à faire sur tout le territoire national ! Avec du recul, je me demande comment faisait Si Ahmed, (Abder pour les intimes) avec ses études de médecine, tout en assumant nos spectacles qui se terminaient très tard chaque nuit ! Il m’apprenait à jouer de la guitare, il voulait que je me cultive et me ramenait des livres, que je trouvais trop compliqués à lire… Bref ! Je reviens à cette fameuse tournée citée dans le livre de Saîd Saadi. Peut-être a t-il été mal informé ?
Le ministère de la jeunesse et des sports m’avait sollicité avec mon groupe pour une tournée en France, en Avril 1974. A l’affiche, il y avait Noura, Abdelkader Guessoum (Paix à leurs âmes) le ballet de Constantine. Il y avait un orchestre avec kamal Hamadi. Nous devions faire le Sud Ouest de la France. L’hébergement et la restauration étaient pris en charge par l’Amicale des Algériens en Europe ! C’était comme ça à l’époque ! Il n’y avait rien d’officiel dans cette tournée, à part aller à la rencontre de notre diaspora ! Dans mon groupe, j’avais un excellent jeune musicien de 18 ans qui jouait du Haut-Bois, Khélil Guechoud issu d’une belle lignée de musiciens, diplomés du Conservatoire d’Alger, dont le père était secrétaire général ! Khélil n’ayant pas passé son service national, l’autorisation de sortie lui avait été refusée ! Pris au dépourvu, Abder et moi avions sollicité Ferhat du groupe Imazighen Imoula, pour le remplacer. Lui et Abder étaient étudiants et amis. Bien qu’averti à la dernière minute, Ferhat a accepté l’offre, par amitié ! La première ville a été Toulouse, nous étions tous hébergés dans une maison de jeunes, à part Noura qui était à l’hotel. Nous avions effectué cette tournée, à travers toutes les villes, jusqu’à Paris ! Durant tout ce temps, Kamal Hamadi nous a proposé de nous présenter Hadj Soulimane, producteur et éditeur de “La voix du Globe”, pour enregistrer deux 45 tours, l’un pour Ferhat, et l’un pour moi ! Nos propres chansons bien sûr ! Le dernier sepctacle à Paris, la troupe a repris l’avion sur Alger ! Mon groupe et moi avions pris des chambres dans un hotel, à nos frais ! On allait avoir des sous puisqu’on avait cette proposition d’enregistrement… Rdv a été pris avec Hadj Soulimane, et studio réservé ! Rabah Khalfa (percussionniste de renom) est venu jouer des percussions. Tout se déroulait à merveille ! J’ai enregistré Ziɣ d netta, musique de Si Ahmed Aberrahmane. Paroles de Ben Mohamed, et Ulama nek Tilemẓit P et M Chérif Kheddam (Paix à son âme). Ferhat également a enregistré ses deux chanson ” Iḍ d was” et Cna”. Nous étions si heureux, jeunes et pleins d’espoirs ! Une fois chose faite, nous commencions à emballer les instruments de musiques, quand Hadj Soulimane avait fait irruption dans le studio : Vous faîtes quoi là ? Ben, on a fini, on remballe nos instruments ! A nous le chèque ! Le mec devient verdâtre et nous lance : Ah mais non ! Tant que vous ne m’enregistrez pas Avava Inouva, et Chenoud, vous n’aurez pas votre chèque !!! Le ciel nous est tombé sur la tête ! Une semaine d’hotel à payer ! Abder et Ferhat ont longtemps résisté à proposer d’autres chansons à nous, mais le vieux n’en démordait pas ! La mort dans l’âme, tristes, nous avions enregistré le duo et Chenoud. Nous sommes ressortis du studio abbatus, et sommes rentrés à Alger le surlendemain ! Idir (paix à son âme) a très bien compris l’arnaque dont nous avions été victimes, et ne nous a pas tenu rigueur ! Nous n’avions pas assisté à la duplication des 45 tours, le vieux a mis ce qu’il a voulu sur les pochettes ! Au passage, quand on dit enregistrer “illégalement” cela veut dire, voler les droits d’auteurs ! Or, cela n’a jamais été le cas, puisque tout a été déclaré dans les règles de l’art, à la SACEM. La loi vous permet d’enregistrer les œuvres d’autrui, sans l’aval de l’auteur et compositeur, à condition de ne pas dénaturer l’oeuvre, et verser les droits d’auteur à qui de droit. Pardonnez-moi d’avoir été si longue, mais je me devais de rétablir la vérité, car c’était mon groupe qui était à l’affiche, et je démens formellement les propos du Saîd Saadi. Une pensée à Monsieur Aît Aïssa, directeur au ministère de la Jeunesse et des Sports, qui nous a chaleureusement accompagnés durant cette tournée. Il est décédé peu de temps après, en tombant de sa fenêtre….
Merci à vous tous, de me lire et de partager.
Tu peux reposer en paix cher Abder.
Zahra N’Summer. Juin 2021.